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Des chercheurs des Émirats arabes unis transforment les déchets d’ananas en nanofibres qui améliorent de 32,7 % la rétention d’eau dans les sols désertiques.

Une étude montre que la nanocellulose dérivée des déchets alimentaires améliore la rétention d’eau dans les sols sableux, le stockage des nutriments et la survie des plantes dans les régions arides.

Des écorces d’ananas transformées en nanocellulose : une innovation prometteuse contre la désertification

Le gaspillage alimentaire est depuis longtemps un défi mondial, mais une nouvelle étude montre qu’il pourrait également faire partie de la solution à la désertification. Publiée dans le Journal of Bioresources and Bioproducts, cette étude montre comment les écorces d’ananas, généralement jetées en grande quantité par les industries des jus et de l’hôtellerie, peuvent être transformées en nanocellulose capable d’améliorer considérablement le comportement des sols sableux dans les climats extrêmement secs.

Dirigée par une équipe internationale de scientifiques, l’étude s’est concentrée sur la transformation des écorces d’ananas en fibres à l’aide de traitements mécano-chimiques comprenant le broyage, le traitement alcalin, le blanchiment et le broyage à billes. Les fibres obtenues, qui vont de la macro-échelle à la nano-échelle, ont ensuite été testées sur trois types de sables désertiques courants aux Émirats arabes unis : les sables lithiques, les sables riches en quartz et les sables calcaires.

Résultats

Les résultats ont été frappants. Les sols traités avec ces fibres ont montré une augmentation de 32,7 % de leur capacité de rétention d’eau et une réduction de 58 % de leur perméabilité, ce qui a permis de freiner la perte d’humidité sur des surfaces où l’eau disparaît généralement en quelques heures. L’évaporation a également diminué de moitié, et la cohésion du sol, essentielle dans les zones où le vent emporte continuellement le sable, s’est améliorée d’un facteur quatre. De plus, la rétention des nutriments, en particulier du phosphore, a presque doublé, ce qui est essentiel dans les zones où les engrais sont rapidement lessivés ou volatilisés.

Les expériences de croissance menées avec des plants de tomates cerises ont confirmé encore davantage les avantages de ces amendements. À des concentrations modérées (0,25 à 1 % de fibres en poids), les plantes ont présenté des taux de survie plus élevés, un nombre de feuilles plus important et un développement plus sain par rapport aux témoins. Cependant, une teneur excessive en fibres (3 %) a réduit la survie, ce qui souligne la nécessité d’ajuster et d’optimiser les niveaux d’application.

Biodégradation des fibres

Au-delà des essais agronomiques, l’étude a analysé la biodégradation des fibres. Dans les environnements riches en matière organique, elles se décomposent rapidement ; en revanche, dans les sables très pauvres, typiques des déserts, elles conservent leur structure plus longtemps. Cette stabilité est utile : elle garantit que les améliorations en matière de rétention d’eau et de structure du sol ne disparaissent pas après une ou deux saisons.

Cette approche s’inscrit dans les principes de la bioéconomie circulaire, où les déchets organiques cessent d’être un problème et deviennent une ressource locale. Des régions telles que le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, qui importent une grande partie de leur nourriture et subissent une pression hydrique croissante, recherchent des solutions permettant de réduire leur dépendance vis-à-vis des ressources externes. Ici, un déchet aussi abondant que l’écorce d’ananas pourrait être transformé en un matériau de grande valeur pour l’agriculture dans les zones arides.

Cette recherche s’inscrit également dans le cadre de projets récents qui explorent les biomatériaux pour améliorer les sols dégradés. En Arabie saoudite, par exemple, des polymères naturels dérivés d’algues sont testés pour freiner la désertification ; au Maroc, des coopératives agricoles expérimentent le biochar issu de l’élagage et des résidus forestiers pour retenir l’eau dans les sols pauvres. La nanocellulose issue des déchets d’ananas s’inscrit dans cette même lignée : des matériaux simples, locaux et ayant un impact direct.

En établissant un lien entre la structure des fibres et la mécanique du sol, la dynamique de l’eau et les interactions entre les plantes et les microbes, la recherche offre une feuille de route pour restaurer les sols désertiques et améliorer la sécurité alimentaire dans les climats arides. Comme le soulignent les auteurs, les prochains travaux devraient affiner les modèles de rétention d’eau dans le sol et explorer comment étendre le processus afin d’intégrer d’autres sous-produits agricoles, ouvrant ainsi la voie à une adoption plus large dans la gestion durable du territoire.

Potentiel

Cette technologie ouvre une voie très pratique :

  • Revaloriser les déchets alimentaires en tant que matière première pour restaurer les sols dégradés.
  • Réduire le stress hydrique dans les régions qui dépendent de l’agriculture dans des conditions extrêmes.
  • Améliorer la sécurité alimentaire sans recourir à des solutions chimiques intensives.
  • Accroître la résilience climatique dans les zones où la désertification progresse plus rapidement que la capacité d’adaptation des communautés locales.

Si ces processus sont mis en œuvre à grande échelle de manière abordable, ils permettront aux producteurs des zones arides d’améliorer leurs cultures sans épuiser les ressources en eau essentielles. Et c’est là que réside la clé : des solutions qui non seulement réparent les sols, mais redonnent aussi leur autonomie à ceux qui les travaillent.

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